Letters always get burned
Très cher Pirate de Carton,
Ce silence nouvellement advenu est fondé sur un regrettable malentendu. Lorsque je vous ai donné mon coeur sur un plateau, sans prévenir quiconque et sans artifice, sans un mot d'explication, vous ne saviez pas (et comment auriez vous pu?) que sa fraîcheur, sa rougeur, et sa vigueur tenaient du miracle.
La dernière fois que je l'avais entr'aperçu, il m'était apparu fort sombre et presque inerte, d'une froideur effrayante.
Je vous l'ai donné sans intention, et c'est peut être le geste le plus simple qu'il me fût advenu de commettre.
Je vous l'ai donné à voir, à manipuler, à prendre peut-être, en toute confiance, poussée par la joie simple et entière de le voir ainsi battre. Cette joie, je pensais pouvoir la partager avec vous, de même que nous nous étions émerveillés de la capacité qu'ont certaines plantes de se régénérer d'elles-mêmes après un hiver cruel ou un été particulièrement mordant.
En aucun cas ne voulais-je m'en décharger sur vous, ou vous en confier la garde douloureuse.
Vous avez d'abord détourné le regard, ne voyant dans ce que je vous offrais qu'un aveu honteux, une tare qu'il eût mieux fallu dissimuler, une affection physique répugnante.
Puis, comme mes mains d'enfant continuaient de tendre vers vous cette excroissance dont vous ne saviez que faire,vous vous en êtes saisi, et ne percevant que son poids, vous l'êtes attaché à la cheville, comme une entrave de bagnard. Vous l'avez trainé au sol, dans votre ombre, sur les pavés descellés de nos nuits et de nos jours, lourd d'une destinée qui ne vous était pas échue.
Je vous le reprends aujourd'hui avant qu'il ne se meure à nouveau, triste de vous voir apesanti par ce qui m'a rendue si légère. Ses égratignures, ses battements un peu fous, ne sont rien que le temps et le soin ne pourront réparer. Transplanté derrière mon sein gauche, de nouveau dissimulé à votre vue, il reprendra racine, nous le savons tous deux.
J'ignore encore qui d'autre que moi aura la primeur de sa prochaine floraison. Je n'ose vous le souhaiter, mais l'espère encore en silence.
Votre Amazone de Papier.
Ce silence nouvellement advenu est fondé sur un regrettable malentendu. Lorsque je vous ai donné mon coeur sur un plateau, sans prévenir quiconque et sans artifice, sans un mot d'explication, vous ne saviez pas (et comment auriez vous pu?) que sa fraîcheur, sa rougeur, et sa vigueur tenaient du miracle.
La dernière fois que je l'avais entr'aperçu, il m'était apparu fort sombre et presque inerte, d'une froideur effrayante.
Je vous l'ai donné sans intention, et c'est peut être le geste le plus simple qu'il me fût advenu de commettre.
Je vous l'ai donné à voir, à manipuler, à prendre peut-être, en toute confiance, poussée par la joie simple et entière de le voir ainsi battre. Cette joie, je pensais pouvoir la partager avec vous, de même que nous nous étions émerveillés de la capacité qu'ont certaines plantes de se régénérer d'elles-mêmes après un hiver cruel ou un été particulièrement mordant.
En aucun cas ne voulais-je m'en décharger sur vous, ou vous en confier la garde douloureuse.
Vous avez d'abord détourné le regard, ne voyant dans ce que je vous offrais qu'un aveu honteux, une tare qu'il eût mieux fallu dissimuler, une affection physique répugnante.
Puis, comme mes mains d'enfant continuaient de tendre vers vous cette excroissance dont vous ne saviez que faire,vous vous en êtes saisi, et ne percevant que son poids, vous l'êtes attaché à la cheville, comme une entrave de bagnard. Vous l'avez trainé au sol, dans votre ombre, sur les pavés descellés de nos nuits et de nos jours, lourd d'une destinée qui ne vous était pas échue.
Je vous le reprends aujourd'hui avant qu'il ne se meure à nouveau, triste de vous voir apesanti par ce qui m'a rendue si légère. Ses égratignures, ses battements un peu fous, ne sont rien que le temps et le soin ne pourront réparer. Transplanté derrière mon sein gauche, de nouveau dissimulé à votre vue, il reprendra racine, nous le savons tous deux.
J'ignore encore qui d'autre que moi aura la primeur de sa prochaine floraison. Je n'ose vous le souhaiter, mais l'espère encore en silence.
Votre Amazone de Papier.
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