20 novembre 2006

L'opéra des flots de l'an saint

Après quelques années d'absence, le théâtre revient...

ACTE I SCÈNE 1


Un vaisseau sur le fleuve. Quelques canots l'entourent, jouant avec le courant. À l'intérieur, un son techno sale et saccadé anime des silhouettes surmontées de visages qui se guettent en s'emplissant d'alcool.

Swanda, un verre à la main
Que la chasse soit ouverte dans cette forêt bien remplie,
Où tout n'est que gibier et proie de nos envies ;
Buvons à cette soirée et aux prises de notre nuit!
[elle lève un verre de champagne]

Valmour, distrait
Tu sais combien cette nourriture
M'inspire et plaît à ma nature...
[il lève son verre]
Mais ma présence ici est pour un dessein particulier
Que les dieux me permettront, ou pas, d'honorer
[il vide son verre]

Swanda
Est-ce cette énigme qui semble t'assombrir
Et te faire oublier que ces corps sont là pour jouir?

Valmour
Tu le sauras... Mais pas maintenant.
[à lui-même]
Neuf mois, le temps d'un enfant...

Swanda
Tu dis...?

Valmour
Rien, rien...
Je me rendais à tes arguments…
[tournant la tête]
Tiens, observ' cette chinoise au regard alcoolique,
Chef d'oeuvre à sa façon de laideur psychédélique

Swanda, regardant de l'autre côté
Je vois beaucoup mieux ce grand Sarazin
Dont je lis le corps comme une gitane, une main

Valmour, narquois
Est-ce la bonne aventure qui animera ces palmes...

Swanda
Ta jalousie est vaine et ne trouble pas mon calme.
Lui, en revanche, pourrait enflammer mon napalm...
[elle rejoint le sarazin]

Valmour, à lui-même
Tant de visages, et pas un de connu
Et surtout pas celui pour qui je suis venu

La Chinoise [s'approche puis se colle à lui]
Miaou miaou, je vois tes yeux qui me harponnent
Moi qui pensais ici ne connaître personne,
Enflamme moi vite avec une allumette

Valmour
... Étrange poisson
Qui appâte son pêcheur avec des cigarettes...
[à lui-même]
L'océan Nymphomanie est une grande maison,
Mais as-t'on déjà vu sirène avec une si laide tête?
[à elle]
Tiens, ce briquet pour enflammer ce que tu dis...

La chinoise
Quelle flamme immense...
oh, quelle étourdie,
Le cigare est tombé... Ne me regarde pas baissée,
Mon décolleté est trop grand pour le cacher
[Valmour regarde au loin dans la salle]
Hmm, tes yeux me fouettent, je le sens,
D'un chaud et fort battement
Fais moi mal, frappe moi, dis moi qui t'invite
Je suis folle, tout tourne, je vacille, tu m'excites

Valmour
Rébou, sans aucun doute, folle peut-être ; la vérité,
Est que pour te faire prendre, tu mets bien peu de doigté

La Chinoise [hystérique]
Je suis ta prisonnière ooh délivre moi, emporte
Moi hors de ces lieux, arrache ces menottes
Qui m'accablent, prends moi vite dans ta grotte
Sens la prière de mes reins!

Valmour
Ne bouge pas, je reviens…
[il part en courant]

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